Élections du CSE : Tout savoir sur les salariés mis à disposition

Élections du CSE : Tout savoir sur les salariés mis à disposition

Lorsqu’il organise les élections du Comité Social et Économique (CSE), l’employeur doit tenir compte des salariés qu’il emploie directement mais aussi des travailleurs extérieurs employés par des entreprises tierces et accomplissant leur travail ou une mission au sein de sa structure. Au rang de ces travailleurs, figurent notamment les « salariés mis à disposition« .

La prise en compte, par une entreprise utilisatrice, des salariés mis à disposition lors des élections professionnelles est l’objet du présent article.

Il ne sera pas question dans cet article de la prise en compte dans le cadre des élections du CSE des salariés temporaires autrement appelés salariés intérimaires.

 

Qui sont les salariés mis à disposition d’une entreprise utilisatrice dans le cadre des élections du CSE ?

Dans le cadre des élections du CSE, les salariés mis à disposition ne sont pas uniquement des travailleurs concernés par les opérations de prêt de main-d’œuvre à but non lucratif telles qu’autorisées à l’article L. 8241-2 du Code du travail (mise à disposition avec refacturation de l’euro à l’euro).

En effet selon la jurisprudence :

« […] Sont intégrés de façon étroite et permanente à la communauté de travail […] les travailleurs mis à disposition par une entreprise extérieure, quelle que soit la nature juridique de ses liens avec l’entreprise utilisatrice, présents depuis au moins un an et qui travaillent sur les mêmes lieux que les salariés de l’entreprise utilisatrice, partageant ainsi avec ces derniers des conditions de travail en partie communes, susceptibles de générer des intérêts communs » (Cass. soc., 15 avril 2015, n° 14-20.200).

Aussi, la notion de salariés mis à disposition recouvre également, outre les salariés mis à disposition au sens du Code du travail, les salariés des prestataires et des sous-traitants.

Cas particulier des salariés portés

S’agissant des salariés en portage salarial ou salariés portés, au regard de l’accord du 24 juin 2010 relatif au portage salarial et des dispositions du Code du travail, la doctrine considère qu’ils doivent être assimilés aux salariés mis à disposition de manière partielle. Nous y revenons ci-après.

 

Comment décompter les salariés mis à disposition dans l’effectif de l’entreprise utilisatrice ?

Conformément à l’article L. 1111-2 du Code du travail :

« […] Les salariés mis à la disposition de l’entreprise par une entreprise extérieure qui sont présents dans les locaux de l’entreprise utilisatrice et y travaillent depuis au moins un an […] sont pris en compte dans l’effectif de l’entreprise à due proportion de leur temps de présence au cours des douze mois précédents […] ».

Il ressort de cette disposition que deux conditions sont requises pour qu’un salarié mis à disposition soit décompté dans l’effectif de l’entreprise utilisatrice :

  • Le salarié doit être présent dans les locaux de l’entreprise utilisatrice ; et
  • Le salarié doit travailler dans l’entreprise utilisatrice depuis au moins un an.

L’administration a précisé dans une circulaire que la condition de présence du salarié dans les locaux de l’entreprise utilisatrice implique que ce dernier soit présent de manière effective dans cette entreprise au jour du décompte. Le salarié doit donc être encore lié à l’entreprise utilisatrice et travailler dans les locaux de celle-ci au jour du décompte.

☝️ REMARQUE

Il en va différemment s’agissant des salariés intérimaires ou des salariés en CDD qui eux sont pris en compte même une fois qu’ils ont quitté l’entreprise.
Pour en savoir plus sur le fonctionnement du calcul des effectifs, consultez notre guide complet du calcul des effectifs (ETP).

Pour ce qui est de la période d’un an, l’administration a précisé dans la même circulaire que cette période n’a pas à être continue. Il peut s’agir donc de plusieurs périodes additionnées, avec des coupures ou non.

⚠️ IMPORTANT

Lorsqu’ils remplacent des salariés absents ou dont le contrat de travail est suspendu, les travailleurs mis à disposition sont exclus du décompte de l’effectif de l’entreprise utilisatrice (C. trav., art. L. 1111-2).

Salariés mis à disposition de manière ponctuelle

Des difficultés peuvent émerger dans le décompte des salariés mis à disposition, notamment concernant les salariés qui interviennent de manière ponctuelle dans l’entreprise utilisatrice.
La jurisprudence a retenu le critère d’intégration du salarié à la communauté de travail pour trancher ces difficultés :

« […] Sont intégrés de façon étroite et permanente à la communauté de travail […] les salariés mis à disposition par une entreprise extérieure qui, abstraction faite du lien de subordination qui subsiste avec leur employeur, sont présents dans les locaux de l’entreprise utilisatrice et y travaillent depuis une certaine durée, partageant ainsi des conditions de travail au moins en partie communes susceptibles de générer des intérêts communs » (Cass. soc. 13 novembre 2008, n° 07.60-434 ; Cass. soc., 13 novembre 2008, n° 07-60.465, n° 07-60.469, n° 07-60.470, n° 07-60.471 et n° 07-60.472 ; Cass. soc., 13 novembre 2008, n° 08-60.331 et n° 08-60.332).

Ainsi, seuls les salariés intégrés de façon étroite et permanente à la communauté de travail depuis au moins un an – c’est-à-dire ceux partageant des conditions de travail en partie communes susceptibles de générer des intérêts communs – sont décomptés dans l’effectif de l’entreprise utilisatrice (Cass. soc., 14 avril 2010, n° 09-60.367).

La Cour de cassation a retenu, concernant des salariés mis à disposition d’une société A de transport mais qui travaillaient indifféremment pour plusieurs transporteurs et qui ne se rendaient que ponctuellement dans les locaux de la société A pour prendre des marchandises et des documents administratifs nécessaires à l’accomplissement du transport, que ces derniers ne sont pas intégrés à la communauté de travail et ne doivent pas être pris en compte dans l’effectif de cette société A (Cass. soc., 14 avril 2010, n° 09-60.367).

En revanche, la Cour de cassation a retenu que des salariés d’une entreprise extérieure mis à la disposition exclusive d’une société et qui se rendaient dans les locaux de cette dernière « […] pour prendre les commandes, charger, décharger, s’habiller, se doucher et prendre leurs repas […] » partageaient avec les salariés de cette société des conditions de travail au moins en partie commune susceptibles de générer des intérêts communs (Cass. soc., 14 décembre 2015, n° 14-17.185). Ces salariés mis à disposition sont ainsi considérés comme étant intégrés de façon étroite et permanente à la communauté de travail.

Cas particulier des salariés en portage salarial

L’accord du 24 juin 2010 relatif au portage salarial prévoit les conditions de prise en compte de ces derniers dans l’effectif de l’entreprise cliente (entreprise utilisatrice). L’article 10 de cet accord dispose que « pour la détermination de l’effectif du client, les salariés portés présents dans ses locaux et qui y travaillent depuis au moins 1 an sont pris en compte à proportion de leur temps de présence au cours des 12 mois précédents ».
La prise en compte dans l’effectif de l’entreprise utilisatrice des salariés portés est donc similaire à celle des salariés mis à disposition.

 

Dans quelle mesure les salariés mis à disposition sont-ils électeurs au sein de l’entreprise utilisatrice ?

Le Code du travail prévoit, à certaines conditions, la possibilité pour les salariés mis à disposition de voter au sein de l’entreprise utilisatrice lors des élections du CSE.

Condition de 12 mois de présence continus

Conformément à l’article L. 2314-23, alinéa 1er du Code du travail, une telle possibilité est offerte aux « […] salariés mis à disposition qui remplissent les conditions mentionnées au 2° de l’article L. 1111-2 […] ». Il est précisé néanmoins que « […] la condition de présence dans l’entreprise utilisatrice est de douze mois continus pour y être électeur » (C. trav., art. L. 2314-23, al. 1).

Ainsi, lorsqu’ils sont présents dans les locaux de l’entreprise utilisatrice et y travaillent depuis au moins 12 mois continus, les salariés mis à disposition peuvent voter au sein de cette dernière. Cette condition de présence continue du salarié mis à disposition dans l’entreprise utilisatrice s’apprécie au moment de l’organisation des élections.

☝️ REMARQUE

Pour le décompte dans l’effectif des salariés mis à disposition, la période de 12 mois n’a pas être à être continue, alors que pour que ces salariés puissent voter au sein de l’entreprise utilisatrice, cette période doit être continue.

Un salarié mis à disposition peut donc être décompté dans l’effectif de l’entreprise utilisatrice, sans toutefois pouvoir être électeur au sein de cette dernière.

Exercice d’un droit d’option

Il est précisé à l’alinéa 2 de l’article L. 2314-23 du Code du travail que :

« […] Les salariés mis à disposition qui remplissent les conditions mentionnées au premier alinéa choisissent s’ils exercent leur droit de vote dans l’entreprise qui les emploie ou l’entreprise utilisatrice« .

Les salariés mis à disposition disposent d’un droit d’option lorsqu’ils remplissent les conditions légales. À ce titre, ils votent donc soit dans le cadre des élections du CSE de l’entreprise utilisatrice, soit de celles de leur employeur.

On pourrait être tenté de considérer que le fait pour ces salariés d’avoir voté dans leur entreprise d’origine les priverait de l’exercice de leur droit d’option. La Cour de cassation ne retient pas une telle position.

En effet, après avoir précisé que c’est à la date d’organisation des élections dans l’entreprise utilisatrice que les salariés mis à disposition doivent être en mesure d’exercer leur droit d’option, la Cour de cassation retient que le fait que ces salariés « […] aient déjà voté dans leur entreprise d’origine ne pouvait en soi les priver de leur droit d’option […] » (Cass. soc., 26 mai 2010, n° 09-60.400).

Cas particulier des salariés en portage salarial

Si leur prise en compte dans le cadre de l’effectif de l’entreprise est similaire à celle des salariés mis à disposition, il en va à notre sens autrement s’agissant de l’électorat de ces derniers.

En effet, dans l’accord susvisé, rien n’est dit sur l’électorat et l’éligibilité des salariés portés au sein de l’entreprise utilisatrice. Le Code du travail, pour sa part, prévoit des dispositions régissant de manière spécifique la participation des salariés portés aux élections qui ont lieu au sein de l’entreprise de portage (C. trav., art. L. 2314-21).

Toutefois, cette disposition ne prévoit rien s’agissant de l’électorat et de l’éligibilité de ces salariés au sein de l’entreprise cliente. De ce fait, la doctrine considère que les salariés portés doivent être exclus de l’électorat de l’entreprise utilisatrice ; ce qui les rend par conséquent également inéligibles au sein de ladite entreprise.

💡 POUR ALLER PLUS LOIN

Pour approfondir sur l’électorat des salariés dans le cadre des élections du CSE, vous pouvez lire notre article de blog intitulé Élections du CSE : le guide complet sur l’électorat et les listes électorales.

 

Les salariés mis à disposition sont-ils éligibles dans l’entreprise utilisatrice ?

Non, conformément à l’article L. 2314-23, alinéa 1er du Code du travail qui dispose que « les salariés mis à dispositions ne sont pas éligibles dans l’entreprise utilisatrice« .

Les salariés mis à disposition restent toutefois éligibles dans leur entreprise d’origine.

💡 POUR ALLER PLUS LOIN

Pour lieux comprendre qui est éligible lors des élections du CSE, vous pouvez lire notre article de blog sur les salariés éligibles lors des élections du CSE.

 

Quelles sont les modalités pratiques de décompte des salariés mis à disposition et d’appréciation de leur électorat ?

Afin de procéder au décompte des salariés mis à disposition et d’établir la liste électorale, l’entreprise utilisatrice interroge, par écrit et avant la négociation du Protocole d’Accord Préélectoral (PAP), les entreprises « employeur » des salariés afin que ces dernières lui fournissent les éléments nécessaires pour ce faire.

☝️ REMARQUE

Il est important à cet égard de se ménager une preuve d’envoi de ces courriers (LRAR et/ou mail avec accusé de réception) et les réponses associées. En effet, les syndicats intéressés à la négociation du PAP peuvent solliciter la production de ces échanges pour comprendre le décompte effectué par l’employeur.

💡 POUR ALLER PLUS LOIN

Pour en savoir plus sur la négociation du PAP, consultez notre article de blog à ce sujet.

Envoi de courrier aux entreprises extérieures

Décompte de l’effectif

Afin de procéder au décompte des salariés mis à disposition, l’entreprise utilisatrice interroge d’abord les entreprises d’origine des salariés afin que ces dernières lui fournissent la liste des travailleurs concernés.

Cette liste doit permettre d’identifier les salariés qui remplissent les critères de présence dans les locaux de l’entreprise utilisatrice et d’ancienneté d’un an (non continu) prévus par l’article L. 1111-2, 2° du Code du travail.
La réponse des entreprises d’origine doit permettre également de quantifier l’équivalent temps plein (ETP) que représenteraient les salariés mis à disposition.

Qualité d’électeur

Les éléments de réponse apportés par les entreprises d’origine sont également importants pour l’appréciation de l’électorat des salariés mis à disposition.
En effet, ces éléments doivent permettre en pratique à l’entreprise utilisatrice de savoir si les salariés mis à disposition remplissent ou non la condition d’électorat prévue à l’article L. 2314-23 du Code du travail, et notamment la condition de présence dans l’entreprise utilisatrice douze mois continus.

Exercice du droit d’option

Il sera question ici d’interroger, par l’intermédiaire des entreprises d’origine, les salariés mis à disposition qui remplissent les conditions pour être électeur afin de savoir si ces derniers souhaitent ou non voter au sein de l’entreprise utilisatrice.
Pour se prémunir contre toute éventuelle contestation, le choix opéré par le salarié doit être acté par le salarié lui-même.

Absence de réponse de l’entreprise d’origine des salariés mis à disposition : Que faire ?

L’employeur est tenu de fournir aux organisations syndicales lors de la négociation du PAP les éléments nécessaires au contrôle de l’effectif et de l’électorat. S’agissant spécifiquement des salariés mis à disposition, l’entreprise utilisatrice doit, sans se borner à interroger les entreprises prestataires, fournir aux organisations syndicales les éléments dont il dispose ou dont il peut demander judiciairement la production par ces entreprises.
À défaut, les élections peuvent faire l’objet de contestations et être annulées (Cass. soc., 26 mai 2010, n° 09-60.400).

La Cour de cassation retient tout de même qu’une entreprise utilisatrice « […] ne s’était pas borné à interroger les entreprises extérieures et avait loyalement satisfait à son obligation de fournir aux organisations syndicales les informations nécessaires au contrôle de l’effectif des salariés […] », lorsqu’elle « […] démontre qu’elle a interrogé 194 entreprises et obtenu 190 réponses […] » et « […] qu’elle a mis en place des moyens humains supplémentaires pour collationner les documents prescrits et permettre leur examen par le syndicat […] » (Cass. soc., 31 mai 2017, n° 16-16.493).

En cas d’absence de réponse de la part des entreprises d’origine, étant donné que l’entreprise utilisatrice ne peut pas se borner à une simple interrogation de ces dernières restée sans réponse, voici les actions qui peuvent être envisagées :

  • Une relance par voie d’écrit et par voie téléphonique au besoin des prestataires concernés ;
  • Si les relances n’aboutissent pas, l’entreprise utilisatrice doit mobiliser tous les moyens nécessaires pour procéder au décompte des salariés mis à disposition. Il est possible, dans certains cas de figures, que le service Ressources Humaines de l’entreprise utilisatrice disposent des informations utiles pour le décompte des salariés mis à disposition et l’appréciation de leur électorat. L’entreprise utilisatrice peut également interroger les différents responsables de service voire le service en charge des interactions avec les prestataires, sur le temps de présence de ces salariés, lorsque les informations des ressources humaines ne sont éventuellement pas complètes ;
  • Une fois que les salariés mis à disposition potentiellement électeurs sont identifiés, l’entreprise utilisatrice peut, à défaut de réponse de leur employeur, les interroger directement pour s’enquérir de leur souhait d’exercer leur droit d’option.

☝️ REMARQUE

En l’absence de réponse de la part des entreprises d’origine des salariés, l’entreprise utilisatrice peut aussi saisir le tribunal judiciaire par voie de référé pour demander la communication des documents et informations nécessaires.

Bien qu’elle comporte l’inconvénient de tenir compte des délais de justice, cette saisine présente l’avantage de la sécurité juridique nécessaire pour éviter la contestation des élections dans l’entreprise utilisatrice, lorsque cette dernière n’est pas en capacité de déterminer à partir des éléments dont elle dispose la prise en compte dans l’effectif et l’électorat des salariés mis à disposition.

💡 POUR ALLER PLUS LOIN

Pour tout savoir sur la contestation des élections du CSE, vous pouvez consulter notre article de blog sur le sujet.

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