La contestation des élections du CSE

Tout savoir sur la contestation des élections du CSE

Le processus encadrant la mise en place du Comité Social et Economique (ci-après désigné « CSE ») étant très encadré, tant par les dispositions légales et règlementaires que par la jurisprudence, le risque d’irrégularité plane au-dessus des Directions des Ressources Humaines organisant tous les 4 ans les élections professionnelles.

Si beaucoup d’élections professionnelles aboutissent à la mise en place du Comité Social Economique sans embuche, les cas de contestation ne sont pas rares pour autant et ce notamment dans les grandes entreprises dans lesquelles les organisations syndicales veillent au respect du cadre législatif.

Mais est-ce que toutes les irrégularités peuvent aboutir à l‘annulation de l’élection ? Qui détient la capacité de contester une élection ? Devant quelle juridiction la contestation doit-elle être portée ? Dans quels délais cette contestation s’inscrit-elle ?

Quelles irrégularités susceptibles d’engendrer l’annulation de l’élection du CSE ?

Toutes les irrégularités commises dans le cadre de l’organisation et du déroulement du scrutin ne constituent pas une cause d’annulation de l’élection professionnelle.

En effet, seules trois catégories d’irrégularités sont susceptibles d’aboutir à une annulation de l’élection si elles sont portées devant la justice.

Les irrégularités méconnaissant les principes généraux du droit électoral

1. Qu’est qu’un principe général du droit électoral ?

L’article L. 2314-28 du Code du travail dispose que :

« Les modalités d’organisation et de déroulement des opérations électorales font l’objet d’un accord entre l’employeur et les organisations syndicales, conclu conformément à l’article L. 2314-6. Cet accord respecte les principes généraux du droit électoral. »

Aussi, outre les règles issues du Code du travail, l’organisation des élections doit se faire dans le respect de ces principes. Mais quels sont ces principes ?

Les principes généraux du droit électoral sont des principes fondamentaux consacrés par la jurisprudence comme par exemple le principe de neutralité de l’employeur, la liberté d’exercice du droit de vote, la liberté de candidature, la sincérité du scrutin et le secret du vote etc.

À SAVOIR

Récemment, la jurisprudence a consacré un nouveau principe général du droit électoral : le principe d’égalité face à l’exercice du droit de vote (Cass. soc., 1er juin 2022, n°20-22.860)
? Voir notre article de blog à ce sujet : Vote électronique CSE et égalité d’exercice du droit de vote.

Il n’existe donc pas de liste précise de ces principes ce qui génère une certaine incertitude s’agissant de la régularité du scrutin.

2. Exemple de telles irrégularité et conséquences sur le scrutin :

En cas de contentieux, peu importe l’influence qu’a eue l’irrégularité sur les résultats du vote, le simple fait qu’elle soit contraire aux principes généraux du droit électoral constitue un motif d’annulation de l’élection du CSE.

Voici quelques exemples d’espèces dans lesquelles la Cour de cassation a estimé que l’irrégularité était contraire à un principe général du droit électoral :

Une irrégularité ayant engendré une influence sur le résultat de l’élection du CSE

Si l’irrégularité n’est pas contraire aux principes généraux du droit électoral mais qu’elle a eue une conséquence sur le résultat de l’élection, elle sera susceptible d’engendrer l’annulation des élections.

Ainsi par exemple, il a déjà été jugé que le vote de deux électeurs après la clôture du scrutin pouvait entrainer l’annulation de celui-ci dans la mesure où le nombre d’inscrits et de votants dans le collège était très restreint (Cass. soc., 27 mai 1987, n°86-60.360).

Une irrégularité ayant eu une incidence sur la représentativité d’une organisation syndicale ou sur le droit pour un candidat d’être désigné délégué syndical

Pour rappel, l’audience syndicale nécessaire à la représentativité des organisations syndicales au niveau de l’entreprise ou de l’établissement se calcule conformément à l’article L. 2122-1 du Code du travail lequel dispose que :

« Dans l’entreprise ou l’établissement, sont représentatives les organisations syndicales qui satisfont aux critères de l’article L. 2121-1 et qui ont recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité social et économique, quel que soit le nombre de votants. »

Par ailleurs, un délégué syndical peut être désigné, en application de l’article L. 2143-3 du Code du travail, « parmi les candidats aux élections professionnelles qui ont recueilli à titre personnel et dans leur collège au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections au comité social et économique, quel que soit le nombre de votants […] »

Ainsi, en cas d’irrégularité qui se produirait au 1er tour des élections du CSE et qui aurait une influence sur le calcul de cette audience électorale (des organisations syndicales ou des candidats en propre), les élections sont susceptibles d’être annulées par le juge.

Il a déjà été jugé en la matière que :

  • des irrégularités «  qui ne concernaient que trois votes, n’étaient pas déterminantes, au niveau de l’établissement, de la qualité représentative de la fédération dont l’audience électorale serait passée de 7, 49 % à 7, 78 %  » et qu’ainsi les élections ne pouvaient être annulées (Cass. soc., 2 mars 2011, n°10-60.101) ;
  • La non-réception de plus de trente bulletins de vote correspondance par les électeurs – bulletins qui auraient pu permettre à un syndicat d’atteindre le seuil des 10% des suffrages exprimés et ainsi d’être représentatif – peut engendrer l’annulation de l’élection du CSE et ce même si l’employeur n’a pas été défaillant dans l’organisation des élections (Cass. soc., 10 mars 2010, n° 09‐60.236).

Qui peut contester une élection professionnelle ?

Se pose la question ici, de l’intérêt à agir de la personne contestant l’élection du CSE.

1. Les organisations syndicales

Les élections peuvent être contestées par un syndicat qui a vocation à participer au processus électoral, peu important qu’il soit représentatif ou non, qu’il ait présenté ou non des candidats, qu’il ait des adhérents ou non au sein de l’entreprise et qu’il ait participé ou pas à la négociation du protocole d’accord préélectoral (Cass. soc., 20 septembre 2018, n°17-60.284).

2. L’électeur et le candidat

Un électeur, candidat ou non, peut également contester les élections mais uniquement pour le collège auquel il appartient (Cass. soc., 27 février 2013, n°11-60.195 ; Cass. soc., 10 juillet 2002, n°01-60.654).

3. L’employeur

Enfin, l’employeur peut lui aussi contester les élections professionnelle (Cass. soc., 15 janvier 2002, n°00-60.276). Le chef d’établissement, s’il est en charge de l’organisation des élections, a également intérêt à agir s’agissant de la contestation des élections du CSE d’établissement (Cass. soc., 4 avril 2007, n°06-60.112).

Quel tribunal contrôle la régularité des élections professionnelles ?

Le Code du travail indique que :  » Les contestations relatives à l’électorat, à la composition des listes de candidats en application de l’article L. 2314-30, à la régularité des opérations électorales et à la désignation des représentants syndicaux sont de la compétence du juge judiciaire. » (C. trav., art. 2314-32).

Aussi, la personne contestant l’élection du CSE (syndicat, électeur ou employeur) devra saisir le tribunal judiciaire par voie de requête qui statuera en dernier ressort (C. trav., art. R. 2314-23 et -24). Cela signifie que l’appel n’est pas possible ; seul le pouvoir en cassation peut être envisagé à l’encontre de la décision du tribunal judiciaire.

À SAVOIR

Conformément aux règles relatives à l’organisation des deux ordres judiciaires et au principe de séparation des pouvoirs, le tribunal judiciaire n’est en principe pas habilité à statuer sur une contestation portant sur une décision administrative. Le contentieux en matière d’élections professionnelles fait exception à cette règle. Ainsi, le tribunal judiciaire est seul compétent s’agissant également des décisions de la DREETS ou de l’inspecteur du travail, deux acteurs administratifs susceptibles de prendre des décisions en matière d’élections professionnelles. Il pourra s’agir par exemple :

Quel délai faut-il respecter pour contester une élection professionnelle ?

1. Quels sont les délais de saisine du tribunal judiciaire ?

Le délai dépend du motif de contestation.

Si la contestation porte sur l’électorat, il doit être introduit dans les 3 jours suivants la publication de la liste électorale (C. trav., art. R. 2314-24 al.2).
Il s’agira des contestations visant par exemple à ce qu’un salarié soit ajouté ou au contraire retiré de la liste électorale. Plus généralement, ces contentieux porteront sur les conditions attachées à la qualité d’électeur (ancienneté requise, âge, qualité de salarié etc.). Il pourra également s’agir de contentieux portant sur la liste électorale elle-même (défaut de publication ou contestation de son contenu).

Si la contestation porte sur la régularité de l’élection, il convient d’introduire le recours dans les 15 jours de l’élection professionnelle (C. trav., art. R. 2314-24 al.4).

Sont ici visés tous les autres litiges qui peuvent survenir à l’occasion de l’organisation des élections. Par exemple : décompte des effectifs, validité du protocole d’accord préélectoral (PAP), composition des collèges, nombre d’établissements distincts, calculs des résultats, neutralité de l’employeur dans l’organisation des élections, mesure d’audience syndicale etc.

ATTENTION

Si une contestation a trait à une irrégularité directement liée au 1er tour des élections, c’est dans les 15 jours du premier tour qu’il conviendra de saisir le tribunal judiciaire.

2. Quel est le point de départ du délai de contestation de l’élection professionnelle ?

Sur le délai de 3 jours :

Le délai de 3 jours afférent aux contestations relatives à l’électorat commence à courir à compte de la publication de la liste électorale. En pratique, il s’agit souvent de l’affichage de la liste électorale mais il peut également s’agir d’une autre modalité de publication que le PAP aurait déterminé.

La jurisprudence a jugé que si la liste électorale fait l’objet d’une modification puis d’une nouvelle publication, cette nouvelle publication est le point de départ du délai de contestation de 3 jours (Cass. soc., 2 décembre 2020, n°19-14.468).
Aussi, en l’absence de publication de la liste conforme aux dispositions du PAP, le délai de contestation l’élection ne s’éteint pas.

À SAVOIR

On dit souvent que la liste électorale doit faire l’objet d’une publication au moins 3 jours avant le premier tour des élections. En réalité, les dispositions légales du Code du travail ne prévoit pas de délai obligatoire avant lequel il convient de publier la liste électorale. Néanmoins, pour le bon déroulement des opérations électorales, il est fortement recommandé que le délai de contestation de la liste électorale soit écoulé avant le 1er tour afin d’éviter toute contestation à ce sujet une fois le scrutin ouvert.

Sur le délai de 15 jours :

Le Code du travail indique que la contestation doit intervenir « dans les quinze jours suivant cette élection » (C. trav., art. R. 2314-24 al.4). La jurisprudence est venue précisée que le point de départ de ce délai correspond en réalité à la « proclamation nominative » des résultats (Cass. soc., 10 mars 2010, n°09-60-253).
Ainsi, comme pour le délai de 3 jours, si la proclamation des résultats n’a pas lieu, le délai de 15 jours ne commence par à courir (Cass. soc., 19 mai 1988, n° 86-60.537). L’élection professionnelle est donc contestable sans limitation de durée.

3. Comment décompte-t-on les délais de contestation de l’élection professionnelle ?

Le délai de contestation se décompte en jour calendaire, c’est-à-dire que tous les jours de la semaine sont pris en compte.
Le délai de contestation commence à courir le lendemain du point de départ, autrement dit le jour de l’événement qui le fait courir ne compte pas (Cass. soc., 10 mars 2016, n°15-20.937). Ainsi :

  • Pour le délai de 3 jours, le premier jour du délai correspond au lendemain de la date de publication de la liste ;
  • Pour le délai de 15 jours, le premier jour correspond au lendemain du jour de la proclamation des résultats.

Le délai de contestation de l’élection professionnelle expire le dernier jour dudit délai à 24 heures (C. proc. civ., art. 642 ; Cass. soc., 24 juin 1981, n° 81-60.519). Le Code de procédure civile précise tout de même, que :

« Le délai qui expirerait normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant. » (C. proc. civ., art. 642).

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