Jurisprudence : Que risque l’employeur s’il transmet la liste d’émargement après l’élection du CSE ?

Jurisprudence : Que risque l'employeur s'il transmet la liste d'émargement après l'élection CSE ?

Une jurisprudence sur la transmission de la liste d’émargement après l’élection du CSE

Une jurisprudence du 20 septembre 2023 a tranché sur la question de la transmission de la liste d’émargement postérieurement à l’élection à d’autres personnes que les membres du bureau de vote ou les personnes habilitées des services du personnel de l’entreprise : c’est une irrégularité mais cette dernière n’est pas de nature à engendrer l’annulation des élections du Comité Social et Économique (Cass. soc., 20 septembre 2023, n°22-21.249).

Faits et procédure

Dans cette affaire, à l’issue de l’élection du CSE organisée par vote électronique, une élue CGT avait sollicité auprès de l’employeur la communication de la liste d’émargement. Demande à laquelle l’employeur avait fait droit.

Quatre jours plus tard, cette élue CGT et l’union départementale de ce même syndicat sollicitaient auprès du tribunal judiciaire l’annulation des élections en raison de l’irrégularité résultant précisément de la transmission par l’employeur de la liste d’émargement.

En première instance, le tribunal judiciaire déboutait le syndical et l’élue de leurs demandes et les condamnait en outre au paiement d’une somme pour procédure abusive.

Les parties déboutées se sont donc pourvues en cassation.

Motivation de la décision

1) Pour motiver sa décision, la Cour de cassation vise tout d’abord une décision rendue le 23 mars 2022

Dans cette affaire du 23 mars 2022 (Cass. soc., 23 mars 2022, n°20-20.047), les élections du CSE étaient organisées par voie électronique.

À l’issue des élections, un syndicat et un salarié avaient sollicité la production de la liste d’émargement, ce que l’employeur avait refusé. Sur ce fondement, les élections avaient été contestées.

La Cour de cassation avait rappelé tout d’abord l’article R. 2314-16 du Code du travail lequel prévoit que :

« La liste d’émargement n’est accessible qu’aux membres du bureau de vote et à des fins de contrôle de déroulement du scrutin. »

Puis, la Haute juridiction avait souligné que l’employeur était tenu, en application des dispositions réglementaires, de conserver sous scellées notamment les fichiers d’émargement et ce jusqu’à ce que l’action contentieuse soit prescrite ou jusqu’au rendu d’une décision définitive (C. trav., art. R. 2314-17).

Enfin, il était évoqué l’article 5 de l’arrêté du 25 avril 2007 selon lequel les listes d’émargement sont tenues à la disposition des membres du bureau de vote et des agents habilités des services du personnel, mais doivent également être tenues à disposition du juge en cas de contestations élections.

Au regard des dispositions qui précèdent, la Cour de cassation avait conclu « qu’il appartient aux parties intéressées de demander au juge, en cas de contestation des élections, que les listes d’émargement soient tenues à sa disposition » et qu’à ce titre le refus de l’employeur de communiquer aux demandeurs les listes d’émargement était justifié.

2) Une fois cette jurisprudence rappelée, la Cour de cassation a validé l’irrégularité, mais pas l’annulation

Une fois cette jurisprudence rappelée, la Cour de cassation, dans l’affaire du 20 septembre 2023, précise que même si le fait que l’employeur transmette la liste d’émargement après la clôture du scrutin à des personnes non visées par les dispositions règlementaires constitue une irrégularité, cette dernière « n’est pas susceptible d’entraîner en elle-même l’annulation des élections. »

💡 REMARQUE

À notre sens, la transmission de la liste d’émargement pendant le scrutin à des personnes non habilitées pourrait en revanche conduire à l’annulation du scrutin.

3) La Cour de cassation conclu donc en rejetant la demande

La Cour de cassation conclu donc en rejetant la demande de la CGT et de la déléguée syndicale.

Cette irrégularité ne constitue donc pas une atteinte à un principe général du droit électoral

Aussi, conformément à la jurisprudence constante de la Cour de cassation en matière de contestation d’élections professionnelles, il y a donc lieu de considérer que cette irrégularité ne constitue pas une atteinte à un principe général du droit électoral.

En effet, pour engendrer l’annulation des élections il faut soit que l’irrégularité ait méconnu un principe général du droit électoral, soit qu’elle ait eu une influence sur le résultat de l’élection, sur la représentativité d’un syndicat ou sur le droit pour un candidat d’être désigné en qualité de délégué syndical.

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