La représentation équilibrée des femmes et des hommes sur les listes de candidats au CSE

Représentation équilibrée des femmes et des hommes sur les listes de candidats aux élections du CSE

Le Code du travail impose aux listes de candidats au CSE le respect de règles relatives à la représentation équilibrée des femmes et des hommes. Sujettes à interprétation, les dispositions de l’article L. 2314-30 du Code du travail ont fait l’objet d’un important contentieux entre 2019 et 2022.

Les différentes jurisprudences rendues ont permis de clarifier la manière dont il convient d’appliquer les règles édictées par le législateur.

Pour autant, tous les acteurs du dialogue social ne semblent pas avoir totalement appréhendés la substance de ces règles ce qui peut générer des tensions au moment notamment de la négociation du Protocole d’Accord Préélectoral (PAP).

On profite donc de cette année de grand renouvellement du Comité Social et Économique pour faire une petite piqûre de rappel sur la teneur de ces règles, traitées sous forme de questions.

Les règles de représentation équilibrée hommes et des femmes sont-elles applicables à toutes les listes de candidats au CSE (listes syndicales et candidatures libres) ?

Non. L’article L. 2314-30 du Code du travail vise pour l’application de ces règles : « les listes mentionnées à l’article L. 2314-29 qui comportent plusieurs candidats ». L’article L. 2314-29 du Code du travail fait référence aux listes du premier et du second tour, listes syndicales ou candidatures libres.

Pourtant, tenant compte de la teneur des travaux parlementaires, la jurisprudence a jugé que ces règles s’appliquent aux listes syndicales déposées au premier ou au second tour de l’élection du CSE. Elles ne trouvent donc pas à s’appliquer aux candidatures libres du second tour (voir en ce sens notamment Cass. soc., 25 novembre 2020, n° 19-60.222).

REMARQUE

Ces règles s’appliquent aux listes de titulaires et de suppléants :

« Le présent article s’applique à la liste des membres titulaires du comité social et économique et à la liste de ses membres suppléants. » (C. trav., art. L. 2314-30)

Quelles sont les règles relatives à la représentation équilibrée des hommes et des femmes que doivent respecter les listes de candidats au CSE ?

L’article L. 2314-30 du Code du travail impose aux listes de candidats déposées :

  • Le respect de la proportion hommes / femmes au sein du collège électoral concerné ;
  • L’alternance homme / femme.

1. Une proportion homme / femme conforme à la composition du collège électoral concerné

Règles de base :

L’article L. 2314-30 du Code du travail dispose tout d’abord :

« Pour chaque collège électoral, les listes mentionnées à l’article L. 2314-29 qui comportent plusieurs candidats sont composées d’un nombre de femmes et d’hommes correspondant à la part de femmes et d’hommes inscrits sur la liste électorale. […]

Lorsque l’application du premier alinéa n’aboutit pas à un nombre entier de candidats à désigner pour chacun des deux sexes, il est procédé à l’arrondi arithmétique suivant :

  1. Arrondi à l’entier supérieur en cas de décimale supérieure ou égale à 5 ;
  2. Arrondi à l’entier inférieur en cas de décimale strictement inférieure à 5.

En cas de nombre impair de sièges à pourvoir et de stricte égalité entre les femmes et les hommes inscrits sur les listes électorales, la liste comprend indifféremment un homme ou une femme supplémentaire. »

Le Code du travail impose donc aux listes le respect de la proportion d’hommes et de femmes présents sur la liste électorale du collège concerné. Il précise également les modalités pratiques du calcul à réaliser.

EXEMPLE

Il y a 70% de femmes, 30% d’hommes dans un collège électoral et 7 sièges à pourvoir. Les listes de candidats complètes déposées dans ce collège devront respecter la proportion d’hommes et de femmes suivante :

  • 70% x 7 = 4,9, soit 5 femmes en application des règles d’arrondi ;
  • 30% x 7 = 2,1, soit 2 hommes en application des règles d’arrondi.

Pour être valable, les listes déposées devront respecter cette proportion sous peine de s’exposer à une contestation.

Cas du sexe dit « ultra minoritaire »

L’article L. 2314-30 du Code du travail fixe une règle spécifique s’agissant du sexe à qui le calcul susvisé n’attribuerait aucun siège :

« Lorsque l’application de ces règles conduit à exclure totalement la représentation de l’un ou l’autre sexe, les listes de candidats pourront comporter un candidat du sexe qui, à défaut, ne serait pas représenté. Ce candidat ne peut être en première position sur la liste. »

La jurisprudence à cet égard est venue confirmer que la présence du sexe ultra-minoritaire sur la liste était une possibilité mais en rien une obligation :

« […] que lorsque l’application des règles de proportionnalité et de l’arrondi à l’entier inférieur en cas de décimale strictement inférieure à cinq conduit, au regard du nombre de sièges à pourvoir, à exclure totalement la représentation de l’un ou l’autre sexe, il résulte de l’article précité que les listes de candidats peuvent comporter un candidat du sexe sous-représenté, sans que les organisations syndicales y soient tenues ; que les dispositions de l’article L. 2314-30 du code du travail étant d’ordre public absolu, le protocole préélectoral ne peut y déroger ; » (Cass. soc., 11 décembre 2019, n°18-26.568)

EXEMPLE

Il y a 2 sièges à pourvoir dans un collège électoral composé de 90% de femmes et 10% d’hommes. En application des règles de calcul évoquées ci-avant, les listes complètes de candidats déposées dans ce collège devraient respecter la proportion d’hommes et de femmes suivante :

  • 90% x 2 = 1,8 soit 2 femmes ;
  • 10% x 2 = 0,2 soit aucun homme. On dit que le sexe masculin est, dans le cadre de cette élection, le sexe ultra-minoritaire.

Conformément à la règle spéciale énoncée, les listes pourront comporter un seul candidat de sexe masculin qui ne pourra être positionné en tête de liste.

ATTENTION

Il ne s’agit pas d’une obligation mais bien d’une possibilité offerte aux listes de candidats. Aussi, dans l’exemple en question, les listes pourraient aussi comporter deux femmes.

Cas d’égalité entre la proportion d’hommes et de femmes dans le collège

Si le collège électoral est composé d’une proportion de femmes et d’hommes identique alors que le nombre de siège à pourvoir est impair, l’article L. 2314-30 du Code du travail dispose que :

« En cas de nombre impair de sièges à pourvoir et de stricte égalité entre les femmes et les hommes inscrits sur les listes électorales, la liste comprend indifféremment un homme ou une femme supplémentaire. »

EXEMPLE

Il y a 3 sièges à pourvoir dans un collège composé de 50% de femmes et 50% d’hommes. Les listes complètes peuvent être composées indifféremment de l’une des deux façons suivantes :

  • 1 homme et 2 femmes ;
  • 2 hommes et 1 femme.

2. L’alternance homme / femme sur les listes de candidats

Outre le respect de la proportion homme / femme du collège considéré, les listes de candidat doivent également respecter la règle de l’alternance :

« […] Les listes sont composées alternativement d’un candidat de chaque sexe jusqu’à épuisement des candidats d’un des sexes. […] » (C. trav., art. L 2314-30)

Il n’est pas imposé un ordre de présentation selon la proportion d’hommes et de femmes dans le collège (Cass. soc., 27 mai 2020, n°19-60.147 ; Cass. soc., 17 mars 2021, n°19-23.344). Les listes peuvent donc indifféremment commencer par une femme ou par un homme, à l’exception du cas du sexe ultra-minoritaire, ce dernier ne pouvant être en tête de liste.

EXEMPLE

Il y a 3 sièges à pourvoir dans un collège composé de 60% d’hommes et 40% de femmes. Les listes complètes comprendront :

  • 60% x 3 = 1,8 soit 2 hommes ;
  • 40% x 3 = 1,2 soit 1 femme

Les listes complètes pourront être composées indifféremment de l’une des façons suivantes :

  • 1 homme ; 1 femme ; 1 homme ;
  • 1 femme ; 1 homme ; 1 homme

Comment les règles de représentation équilibrée homme / femme s’appliquent-elles aux listes incomplètes ?

Lors des élections du CSE, les listes de candidats déposées n’ont pas l’obligation d’être complètes. Pour appliquer les règles de représentation équilibrée des femmes et des hommes, il convient de faire une proratisation en fonction du nombre de candidats présents sur la liste.

EXEMPLE

Il y a 70% de femmes, 30% d’hommes dans un collège électoral et 7 sièges sont à pourvoir. Un syndicat dépose une liste comprenant 4 candidats. Cette dernière devra comprendre :

  • 70% x 4 = 2,8 soit 3 femmes ;
  • 30% x 4 = 1,2 soit 1 homme.

La liste pourra être composé de l’une des façons suivantes :

  • 1 homme ; 1 femme ; 1 femme ; 1 femme ;
  • 1 femme ; 1 homme ; 1 femme ; 1 femme.

La jurisprudence est venue consacrer une obligation de mixité d’ordre public. Ainsi, dès lors qu’un siège au moins devrait être attribuée au sexe minoritaire pour une liste complète, le dépôt d’une liste incomplète doit en tout état de cause être mixte. (Cass. soc. QPC, 9 mai 2018, n° 17-14.088 ; Cass. soc., 17 avril 2019, n° 17-26.724 ; Cass. soc., 11 décembre 2019, n° 18-23.513 ; Cass. soc., 11 décembre 2019, n° 18-19.379). Autrement dit, même si l’application des règles de prorata évoquées ci-avant conduisent à écarter le sexe minoritaire, sauf exception liée au cas du sexe ultra-minoritaire :

  • La liste devra en tout état de cause comporter un candidat des deux sexes ;
  • Une liste syndicale ne pourra donc comprendre un unique candidat.

EXEMPLE

Il y a 80% de femmes et 30% d’hommes au sein d’un collège et 7 sièges à pourvoir. En cas de liste complète, 6 sièges devraient être attribués à des femmes et 1 siège à un homme. Si un syndicat dépose une liste avec 2 candidats, en application des règles de proratisation, elle devrait comprendre :

  • 80% x 2 = 1,6 soit 2 femmes ;
  • 20% x 2 = 0,4 soit aucun homme.

Or, en application de l’obligation de mixité imposée par la Cour de cassation, il n’est pas possible d’évincer les hommes qui aurait dû être représenté en cas de liste complète. Aussi, la liste incomplète devra nécessairement comprendre 1 homme et une femme et pourra indifféremment positionner en première position l’un des deux sexes.

La seule exception à cette obligation parité : le cas du sexe ultra-minoritaire. Dans ce cas, un syndicat pourra effectivement déposer une liste de candidats comportant uniquement un des deux sexes ou deux candidats du sexe surreprésenté (Cass. soc., 11 décembre 2019, n°18-26.568).

Le protocole d’accord préélectoral peut-il acter d’une dérogation aux règles de représentation équilibrée des femmes et des hommes ?

Non, ces règles étant d’ordre public absolu. Le protocole d’accord préélectoral ne peut donc y déroger en prévoyant que :

« les organisations syndicales s’engagent à rechercher les voies et les moyens qui permettraient de parvenir le plus possible à une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes sur les listes de candidats »(Cass. soc. 9 mai 2018, n°17-60.133).

Le protocole ne peut pas non plus imposer la présence sur les listes de candidats du sexe ultra-minoritaire (Cass. soc., 11 décembre 2019, n°18-26.568).

RAPPEL

Le protocole d’accord préélectoral doit mentionner la proportion de femmes et d’hommes composant chaque collège électoral (C. trav., art. L. 2314-13).

Quels sont les risques en cas de non-respect des règles de représentation équilibrée homme / femme par une liste de candidat ?

En cas de non-respect des règles susvisées, il est possible de contester l’élection du ou des salariés élus en méconnaissance soit des règles de proportionnalité de la part d’hommes et de femmes dans le collège soit de l’alternance entre les sexes. En effet, l’article L. 2314-32 du Code du travail dispose que :

« […] La constatation par le juge, après l’élection, du non-respect par une liste de candidats des prescriptions prévues à la première phrase du premier alinéa de l’article L. 2314-30 entraîne l’annulation de l’élection d’un nombre d’élus du sexe surreprésenté égal au nombre de candidats du sexe surreprésenté en surnombre sur la liste de candidats au regard de la part de femmes et d’hommes que celle-ci devait respecter. Le juge annule l’élection des derniers élus du sexe surreprésenté en suivant l’ordre inverse de la liste des candidats.

La constatation par le juge, après l’élection, du non-respect par une liste de candidats des prescriptions prévues à la seconde phrase du premier alinéa du même article L. 2314-30 entraîne l’annulation de l’élection du ou des élus dont le positionnement sur la liste de candidats ne respecte pas ces prescriptions. […] »

La jurisprudence est venue préciser que le juge doit prononcer l’annulation de l’élection du candidat du sexe surreprésenté sur la liste par rapport à la proportion de chaque sexe dans le collège en suivant l’ordre inverse de la liste de candidature, peu important le nombre d’élu du sexe surreprésenté (Voir en ce sens Cass. soc., 27 mai 2020, 19-60.147).

EXEMPLE

Les listes complètes de candidats doivent se composer de 3 femmes et 4 hommes. Un syndicat a déposé la liste suivante :

  • 1 homme ;
  • 1 femme ;
  • 1 homme ;
  • 1 homme ;
  • 1 homme ;
  • 1 homme.

Les trois premiers de la liste sont élus. Compte tenu de ce que la liste compte un homme de trop, le sexe masculin est donc surreprésenté. L’élection de l’homme élu en seconde position pourra donc faire l’objet d’une annulation, peu important qu’il soit le seul élu du sexe surreprésenté.

La jurisprudence a également admis la possibilité de contester la régularité de la liste avant que l’élection ait lieu :

« le tribunal d’instance peut être saisi, avant l’élection, d’une contestation relative à la composition des listes de candidats en application de l’article L. 2314-30 du même code et déclarer la liste électorale irrégulière au regard de ce texte, dès lors qu’il statue avant l’élection, en reportant le cas échéant la date de l’élection pour en permettre la régularisation » (Cass. soc., 11 décembre 2019, 18-26.568)

À SAVOIR

Les règles de suppléance ne s’appliquent pas en cas d’annulation de l’élection d’un candidat pour non-respect des règles de représentation équilibrée femmes-hommes sur les listes de candidats en application de l’article L. 2314-32 du Code du travail. Ainsi, dans ce cas, il n’y aura pas lieu de désigner un suppléant pour occuper le poste laissé vacant (Cass. soc., 22 septembre 2021, n° 20-16.859).

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